- chezdeen - https://www.chezdeen.com -

#301 : Pouvez-vous éclaircir l’évènement dit “Arrêt” pseudo-fiançailles ?

Question-Réponse n° 301

Pouvez-vous indiquer comment se passe des fiançailles dit “Arrêt” ?

Question d’une sœur chezdeenaute de Créteil (94) : “Ma sœur à l’île se doit d’organiser ce qu’on appelle communément un ‘arrêt’ pour ne pas dire fiançailles, pour ma nièce. Sur sa demande, je me retourne vers vous pour avoir des éclaircissements, surtout sur la procédure et éventuellement les coutumes à respecter, car c’est une première dans ma famille proche et elle ne sait trop comment faire”

Réponse : Excellent questionnement à une époque où les traditions sont bafouées voire abandonnées, surtout les valeurs de nos grands-parents (en créole ; nou bane grands-dimounes). L’éclairage suivant décline de nos coutumes mauriciennes et valeurs spirituelles, sans que ce soit pour autant formel. Car chacun peut adapter à sa manière mais le respect de certaines règles reste de mise, au nom de l’honneur des familles.

En effet, les fiançailles (dites ‘khitbah’ en arabe et ‘manggni’ en urdu) étaient pratiquées à la base en islam lorsqu’il y avait une éventualité de mariage entre un garçon et une fille de différentes tribus, pour favoriser et permettre des échanges commerciaux entre ces tribus.

Elles continuent à se tenir dans plusieurs pays musulmans (chacun à sa manière) mais au fil des temps, les savants et érudits ont mis en garde contre les dérives (fréquentations exagérées des futurs mariés, voire risque d’adultère) et ont fini par bannir les fiançailles en tant que telles mais encourager la tenue d’une convenance parentale engageant leurs enfants comme futurs mariés.

Ainsi, ce n’est donc pas une cérémonie mais une réunion familiale ou parentale dit “Arrêt” (Mawqoûf en arabe) durant laquelle la famille du garçon vient demander la main de la fille.

Dans le cadre d’une “demande” faite par un(e) intermédiaire (‘agwa’), sur accord de la famille de la fille (après consentement favorable de cette dernière), ses parents autorisent les parents du garçon à venir pour l’Arrêt. Dans le cadre d’un cas d’amour (entre les deux tourtereaux), le garçon peut aller symboliquement demander la main de sa dulcinée, auprès des parents de la fille et en cas d’accord de ces derniers, le garçon propose alors d’emmener ses parents en vue d’honorer ces derniers, pour un Arrêt. Les parents des deux côtés s’honorent aussi de la présence des grands-parents et doyens familiaux.

La tenue de cet évènement dit “Arrêt” se fait chez les parents de la fille, qui reçoivent la famille du garçon. Débutent les pourparlers de droiture, devant les tourtereaux (assis alors séparément), les parents conviennent des accords des tourtereaux et confirment donc l’engagement que leurs enfants se marieront à l’avenir.

Dès cet accord convenu, le point d’orgue de l’évènement demeure le ‘tilâwat-é-Qurân’ et du’as d’un Imâm, dont le ‘fâtéhah’ scellera cet engagement familial. Selon les principes de nos aïeux, le sacré demeure le saint-Coran.

Après le ‘fâtéhah’, la fille et le garçon sont autorisés à s’asseoir côte-à-côte et souvent il y a échange de cadeaux de part et d’autre. Le cadeau maître du garçon est habituellement une bague (dite de fiançailles) et l’honneur appartient à la mère du garçon à passer la bague dans le doigt de la fille, compte tenu que la coutume (islamique celle-ci) n’autorisera le garçon à enfiler un anneau (notamment une alliance) dans le doigt de la fille qu’à l’occasion ultérieure de son Nikâh (mariage).

Les entretiens parentaux se poursuivent en général sur le sujet du futur mariage et par la même autorisent le garçon, en attendant le mariage, à venir visiter (de manière encadrée) sa fiancée (en créole : alle-fréquenter) dans la maisonnée des parents de cette dernière.

L’évènement d’un Arrêt est aussi l’occasion d’une collation (nashtâ), on évite les repas (dîner ou déjeuner) pour une telle occasion pour ne pas être pris dans les préparatifs et privilégier ainsi l’évènement. En général, les repas familiaux suivent à d’autres occasions durant la période d’attente jusqu’au Nikâh.

Les érudits déconseillent de longues périodes entre ces pseudo-fiançailles et le mariage, et prônent que le nikâh soit fait sans trop tarder (quelques mois, ou moins d’un an tout au plus) pour éviter des désagréments d’attente. Cette période doit surtout permettre aux parents de pouvoir organiser le mariage. Souvent, en vue que cette période ne soit pas trop longue, l’Arrêt est fixé expressément quelques mois avant le mariage effectif.

À l’issue de cet évènement dit Arrêt, le garçon et la fille sont considérés comme étant ‘fiancés’. Ils doivent se comporter en conformité avec les valeurs du deen et ne pas se laisser aller aux péchés et actes blâmables. Ils doivent préserver l’honneur de leur famille respectives, car ils seront eux-mêmes des parents à l’avenir.

À ce stade, le garçon n’a islamiquement aucun droit sur la fille, qui demeure sous la responsabilité de ses parents, ce n’est qu’au nikâh (mariage) qu’il aura les droits que lui octroi le deen. En somme : avant l’arrêt, la fille est sa dulcinée ; après l’arrêt et avant le nikâh, la fille devient sa promise ; après le nikâh, la fille devient son épouse.